En tant que consultants depuis plus de quinze ans dans les secteurs public et privé, nous avons été amenés à faire plusieurs observations préoccupantes sur la santé des organisations contemporaines. Les constats que nous souhaitons vous partager n'ont pas fait l'objet de recherches scientifiques, mais résultent de nos expériences concrètes liées à des interventions en management et en développement organisationnel.
À la lumière de notre expérience, le parallèle entre l'organisation et le corps humain nous apparaît des plus intéressants, car il permet plusieurs analogies illustrant l'état de santé des organisations d'aujourd'hui.
Les symptômes actuellement observés dans les milieux de travail nous amènent à affirmer que l'organisation, peu importe sa taille et son secteur d'activité, semble souffrir d'épuisement. Plusieurs organes semblent en dysfonctionnement et nuisent à la santé organisationnelle. L'organe principal, le cœur de l'organisation, c'est-à-dire les personnes qui la composent, ne suit plus le rythme imposé par le corps. Or, comme le cœur le fait pour le corps, les personnes dans l'organisation remplissent une fonction vitale. Plusieurs symptômes témoignent de cet épuisement : essoufflement, absences, roulement, désengagement du personnel.
Les gestionnaires, à l'image des vaisseaux sanguins qui font circuler le sang vers le cœur puis le redirigent à travers le reste du corps, doivent alimenter et soutenir les employés afin d'obtenir un rendement optimal, atteindre des buts communs à l'intérieur d'une structure adéquate et avec les compétences requises. Dans le contexte actuel, ces nouveaux défis représentent un vrai marathon mené au rythme d'un sprint!
Comme les vaisseaux sanguins obstrués, les gestionnaires sont surchargés et n'arrivent plus à fournir. Les nombreuses pressions et contraintes de l'environnement amènent les gestionnaires à s'éloigner de leur fonction première. Ils sont confrontés à la gestion de la complexité, tant à cause du rythme imposé par les pressions organisationnelles que des nombreuses problématiques à gérer. Cette complexité exige d'eux plus de temps et d'efforts mentaux. Ils ont donc moins d'espace temps, moins de dispositions et moins de réponses aux questions multiples auxquelles ils doivent répondre. En somme, on constate une disponibilité réduite des gestionnaires et une discordance des attentes de l'organisation envers ces derniers et celles liées à leur fonction première.
Enfin, un autre élément semble contribuer au malaise actuellement observé : la technologie, notamment le « port » du BlackBerry. Ce petit outil révolutionnaire semble nuire à la qualité de la présence nécessaire aux gestionnaires puisque ces derniers figurent maintenant au « top ten » des intervenants de première ligne, enclins à répondre à toutes les demandes quotidiennes urgentes! Encore une fois, cette situation amène les gestionnaires à gérer toutes sortes de demandes, parfois non associées à leur fonction.
Bref, les employés et gestionnaires sont de plus en plus essoufflés et souhaitent retrouver un rythme adéquat pour mieux fonctionner. Pour éviter ces troubles de santé organisationnelle, une réflexion s'impose.
Quel serait donc le programme de mise en forme à prescrire pour s'assurer que l'organisation puisse tenir la course de l'innovation, du développement et de la performance?
En premier lieu, il serait important de recentrer la fonction des gestionnaires en priorisant des attentes liées à l'encadrement de leurs employés, sans oublier de retirer certaines tâches administratives de leur agenda, leur permettant d'être plus disponibles. En recadrant cette fonction importante, tout le sens du rôle de gestionnaire devrait renaître.
De saines habitudes devraient être instaurées dans l'organisation pour la maintenir en santé! En fait, valoriser le temps de qualité, l'établissement de relations interpersonnelles riches et le soutien offert aux gestionnaires seraient des exemples de saines habitudes organisationnelles. Et pour arriver à les adopter, ce sont les dirigeants qui donneront l'exemple.
Ces observations soulèvent donc un questionnement profond sur le sens du terme « gestionnaire ». Quelle est sa fonction première? Les attentes et pressions organisationnelles sont-elles cohérentes avec cette fonction? Voilà matière à réflexion...
À suivre!