« Si je me trompe, les autres vont penser que je suis incompétent. » « C’est inacceptable de remettre un livrable contenant des erreurs. » « Les autres ne sont pas aussi consciencieux dans leur travail que moi. »
Ces pensées vous traversent-elles l’esprit à l’occasion? Peut-être même plusieurs fois par jour? En fait, ces exemples de pensées sont tous associés à des tendances perfectionnistes.
Le perfectionnisme se définit comme le besoin d’atteindre une image de perfection idéalisée, et ce, dans toutes les sphères de sa vie (Ozbilir, Day and Catano, 2015). Cette recherche de perfection est accompagnée d’un grand niveau de stress et d’anxiété, découlant de la forte pression que les perfectionnistes se mettent sur les épaules.
On confond souvent à tort perfectionnisme et poursuite du succès ou attitude consciencieuse. Alors que la poursuite du succès et l’attitude consciencieuse impliquent une fixation d’attentes et d’objectifs ambitieux, mais réalistes, le perfectionniste se fixe plutôt des objectifs inatteignables et irréalistes, lesquels le conduisent à être constamment insatisfait de sa performance et de lui-même (Hewitt, 2009). Tel que souligné par Mc Mahon et Rosen (2008), l’atteinte de hauts standards et la recherche de performance conduisent au succès, alors que le perfectionnisme est synonyme de coûts en temps et en énergie. Les recherches ont démontré que le perfectionnisme est associé à une moins grande satisfaction au travail, à davantage de stress et à un plus grand risque d’épuisement professionnel (Monck, 2009).
Le perfectionniste au travail
En entreprise, le perfectionnisme comporte son lot de bons côtés. En effet, le perfectionniste est souvent rigoureux, travaillant et consciencieux. Il porte une grande attention aux détails et veille à l’obtention d’un produit d’une qualité impeccable.
Toutefois, son attention aux détails lui fait souvent perdre de vue la vision d’ensemble du projet, l’amenant à consacrer une grande partie de son temps aux détails d’importance moindre. Le perfectionniste vise la performance à tout prix, préférant livrer un travail en retard plutôt qu’imparfait. Exigeant, il démontre une certaine rigidité dans ses méthodes de travail, ce qui limite ses capacités de délégation, de peur que la tâche déléguée ne soit pas parfaitement accomplie. La peur de l’échec est très présente chez le perfectionniste, ce qui le conduit à éviter les situations à risque dans lesquelles il pourrait être exposé à un échec (ex. : nouveau mandat, nouveau poste) et à faire preuve d’une faible tolérance à l’ambiguïté. Enfin, ses standards de perfection font généralement du perfectionniste un « micro gestionnaire », ce qui peut créer des insatisfactions au sein de son équipe.
Des stratégies pour gérer son perfectionnisme
Changer les pensées automatiques
« Si je fais une erreur, les autres vont penser que je suis incompétent ». Les pensées automatiques du perfectionniste sont souvent démesurées et rigides. Or, elles conditionnent les réactions de ce dernier. En identifiant les pensées qui l’habitent, le perfectionniste pourra les questionner : « Est-ce que les gens vont réellement me trouver incompétent si je fais une erreur? Est-ce que je vais réellement me faire congédier? ». Tranquillement, à force de prises de conscience et de confrontation, les pensées automatiques se modifieront pour être remplacées par des pensées plus adaptées. Le perfectionniste peut même confronter ses pensées automatiques auprès d’autres personnes de confiance s’il se sent confortable de le faire.
Se construire une boîte à outils
À plus court terme, le perfectionniste peut se construire une boîte à outils qui l’aidera à gérer son perfectionnisme. En participant à des activités de développement portant sur la gestion du temps et des priorités, la délégation, la gestion du stress, la collaboration ou le travail en équipe, le perfectionniste se donne l’occasion de réfléchir sur lui-même et sur sa façon d’agir au travail. Il se donne également quelques moyens pour pallier aux aspects plus négatifs du perfectionnisme. Enfin, le perfectionniste peut également se mettre au défi d’accepter un nouveau mandat si ce dernier est réalisé dans des « conditions contrôlées ». Par exemple, le perfectionniste pourrait être accompagné d’un coach lors de son mandat, ou alors accepter de nouvelles responsabilités de manière temporaire seulement (ex. : intérim). De ce fait, le risque d’erreur ou d’échec sera moindre, ce qui paraîtra plus rassurant pour le perfectionniste.
Puisque le perfectionnisme fait partie de la personnalité, il importe de garder à l’esprit que les solutions pour réduire ses effets négatifs impliquent un travail en profondeur et à plus long terme de l’individu sur lui-même. C’est pas à pas que le perfectionniste arrivera à trouver l’équilibre dans lequel il sera confortable.
Références
FLETT, G.L., and P.L. HEWITT, (2002). Perfectionism: Theory, research and treatment, Washington, DC: American Psychological Association.
HEWITT, P. (2009). Le perfectionnisme, Société canadienne de psychologie. Repéré à http://www.cpa.ca/lapsychologiepeutvousaider/perfectionnisme/.
MC MAHON, G., and A. ROSEN (2008, Mai). Why perfectionism at work does not pay, Training Journal, 60-63.
MONCK, L. (2009). The Impact of Perfectionism on Work Attitudes and Behavior, Thèse de doctorat inédite, University of New York, New York, NY.
OZBILIR, T., DAY, A., and V. M. CATANO (2015). Perfectionism at Work: An Investigation of Adaptive and Maladaptive Perfectionism in the Workplace among Canadian and Turkish Employees, Applied Psychology: An International Review, 64(1), 252–280, DOI:10.1111/apps.12032.