Tous les jours, les médias nous rapportent de multiples exemples de manifestations de la violence s’exerçant dans les différents milieux de vie, tels que la famille, l’école, le travail et les organisations de loisirs et de sports. Se présentant sous différentes formes, la violence physique, psychologique, sexuelle ou financière est une problématique de société touchant tous les milieux socioéconomiques.

Au cours des derniers mois, les médias ont mis particulièrement en lumière des histoires bouleversantes de violence sexuelle perpétrée dans les milieux d’enseignement supérieur : des initiations d’étudiants où des femmes ont été traitées en objets sexuels, ou des agressions dans des résidences étudiantes, pour n’en nommer que quelques-unes. Les événements dont nous avons été informés ont ébranlé plusieurs d’entre nous. Les milieux d’enseignement supérieur ont cherché à comprendre la situation afin d’intervenir de façon adéquate, dans le but d’assurer à tous les membres de la communauté universitaire un milieu de vie sécuritaire, sain et respectueux.

Ces récents événements ont eu pour effet de ramener une fois de plus au cœur du débat public québécois la problématique de la violence sexuelle. Ainsi, à travers les mots « culture du viol », « consentement », « prévention » ou « protection », nombreuses ont été les personnes à dénoncer les actes rapportés par les médias dans des articles de journaux, des apparitions télévisuelles, des commentaires radiophoniques ou des articles de blogue. Parmi les nombreuses voix qui se sont élevées, certaines ont cherché à comprendre : Mais pourquoi? Comment aurions-nous pu prévenir?

Ainsi, en 2016, douze chercheurs de six universités québécoises (réseau des universités du Québec et hors réseau) ont collaboré à la réalisation d’une vaste recherche permettant de mieux comprendre l’aspect spécifique de la problématique de la violence sexuelle en milieu universitaire. Le rapport de recherche émanant de l’Enquête « Sexualité, Sécurité et Interactions en Milieu Universitaire » (ESSIMU) réalisée auprès de plus de 9 000 répondants(es), stipule, entre autres, qu’une personne sur trois membres de la communauté universitaire (étudiants, enseignants ou employés) a vécu au moins un événement de violence sexuelle depuis son entrée à l’université (Bergeron et al., 2016).

 De plus, l’enquête nous révèle que :

• 47,4 % des actes de violence sexuelle en milieu universitaire (VSMU) se passent dans un contexte de fête, 5 à 7 ou autre activité sociale;

• 38,7 % dans des activités d’enseignement ou d’étude;

• 31,1 % pendant que la personne effectuait ses tâches au travail (à l’exception des activités d’enseignement);

• 15,6 % dans un contexte d’environnement virtuel;

• 12,2 % dans un contexte d’implication étudiante;

• 12 % lors d’une initiation facultaire ou départementale;

• 3,6 % dans un contexte sportif (excluant les initiations);

• 1 % lors d’une initiation sportive.

Ces données récentes nous permettent de mieux comprendre la problématique de la VSMU et alimentent la réflexion quant aux actions à poser afin d’y mettre un terme.

Intervenir en prévention

L’ensemble des organisations et des institutions d’enseignement est interpellé afin de mettre en place des moyens d’assurer des milieux de travail et de vie respectueux, sains et sécuritaires à l’ensemble des personnes. Bien que la violence sexuelle soit à l’ordre du jour actuel des médias, l’expérience de Alia Conseil dans le domaine de la prévention de la violence démontre l’importance d’aborder TOUTES LES FORMES DE VIOLENCE (psychologique, sexuelle, physique et financière), puisqu’il s’agit de manifestations différentes d’une prise de pouvoir de certaines personnes sur d’autres et en l’occurrence, pour la violence sexuelle, des hommes sur les femmes. Or, l’utilisation d’une approche à la fois systémique et humaniste permet d’aborder toutes les formes de violence, à tous les niveaux de l’organisation, en invitant chaque membre de la communauté (direction, gestion, syndicat, employé) à se RESPONSABILISER face à son bien-être, sa sécurité et à ceux d’autrui en sortant du silence lorsqu’une situation de violence se manifeste. De fait, l’approche humaniste interpelle chaque être humain au regard de sa capacité à construire ou à dévaloriser les autres ou soi-même. L’approche systémique quant à elle interpelle le système organisationnel avec sa culture, ses règles et ses normes qui lui sont propres et parfois créatrices de banalisation/normalisation de manifestations de la violence. La combinaison de ces deux approches envoie comme message que la prévention de la violence : c’est l’affaire de TOUS et TOUTES.

En 2004, le Québec a fait un important pas en avant en matière de prévention de la violence en faisant entrer en vigueur une série d’articles à la Loi des normes du travail (LNT, 2002, art 81.18 à 81.20 et art 123.16) sur la prévention du harcèlement psychologique au travail, incluant les actes, les gestes et les conduites vexatoires à caractère sexuel. Un premier pas affirmatif de nos valeurs de respect était alors confirmé de façon claire et soutenue dans un texte de loi autre que les chartes. L’ensemble des milieux de travail québécois a alors été invité à mettre en place des mesures visant à prévenir la violence. Plusieurs organisations de travail ont alors exprimé un message clair et affirmatif des valeurs de respect et condamnant toute forme de violence au travail. Elles ont rapidement compris que de multiples actions variées, cohésives et continues permettent un changement des mentalités et, à long terme, le développement d’une culture de respect dans les organisations. Ces actions doivent permettre la prise de conscience de tous et toutes au regard de leurs comportements et de leurs impacts sur les autres, soutenir les victimes de toute forme de violence, responsabiliser et outiller les témoins et favoriser une culture de respect. Ainsi, des politiques institutionnelles de prévention du harcèlement psychologique, sexuel et de la violence sous toutes ses formes et des mécanismes clairs permettant le dépôt et le traitement des signalements et des plaintes ont été instaurés dans plusieurs organisations. De plus, une approche visant l’éducation au respect pour tous et toutes apparaît une stratégie gagnante afin de soutenir l’ensemble des communautés de travailleurs dans le développement/maintien de milieux de travail respectueux, sains et sécuritaires.

Malgré le travail sérieux de plusieurs organisations, 13 ans plus tard les médias nous démontrent une fois de plus que nous devons toujours demeurer alertes et vigilants en poursuivant nos efforts dans tous les milieux (famille, éducation, travail, sports et loisirs) au regard de la violence afin de construire jour après jour sans répit une culture de respect.

 

Références

BERGERON, M. et autres (2016). Violences sexuelles en milieu universitaire au Québec : Rapport de recherche de l’enquête ESSIMU. Montréal : Université du Québec à Montréal.

BRAUDO, S., et A. BAUMANN (2017). « Définition de Violence », Dictionnaire du droit privé de Serge Baudo, Repéré à https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/violence.php.

ÉDUCALOI (2017). Le harcèlement psychologique au travail, repéré à https://www.educaloi.qc.ca/capsules/le-harcelement-psychologique-au-travail.

LOI SUR LES NORMES DU TRAVAIL (LNT), (2017). Repéré à http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/showdoc/cs/N-1.1